À propos

Où sont les falbalas ?

La mode, serait-elle encore un moyen d’expression privilégié des avancées sociales des femmes ? Pour répondre à cette question, retraçons ses fluctuations à partir des années folles jusqu’à aujourd’hui. En effet, c’est à cette période que la vie des femmes va changer, irrémédiablement. La femme moderne a fait son apparition et ses tenues vestimentaires vont connaître une transformation sans précédent. Qu’en est-il de la femme d’aujourd’hui ? Que disent ses vêtements sur sa place dans la société ?

Publié dans Activmag,

 

En 1920, nous sommes encore loin des courants féministes et c’est avant tout l’aspect pratique et confortable des modes masculines qui séduit la majeure partie des femmes.  Toutefois, elles n’oublient pas d’être élégantes et les couturiers inventent pour elles, le Sportwear. Cependant, c’est la silhouette androgyne qui incarnera à tout jamais le style de cette époque avec ses lignes droites, la rigueur des vêtements tubulaires, et l’arrivée des coupes de cheveux, dites à « la garçonne ». Néanmoins, l’accélération du temps et la mise en mouvement des femmes favoriseront la mode dite kinétique. Lucien Lelong, son fondateur, nous dira : « Cette ligne animée est aussi franche et intrépide que la femme d’aujourd’hui. Elle est indépendante et parfois effrontée ». Bien entendu, nous ne pouvons pas, ne pas citer l’influence de Coco Chanel, qui très talentueuse et visionnaire, détournera la maille de son usage traditionnel pour en faire la matière emblématique du confort et de l’aisance.

Liberté, égalité, …

Ces aspirations du début du 20ème siècle, exprimées au travers d’une silhouette libérée de toutes entraves, du corps féminin dévoilé, de l’allure à la garçonne, se retrouveront au milieu des années 60. Le corps se dénudera encore davantage (Mary Quant dévoile tout à fait les jambes féminines) et la garde-robe poursuivra son décloisonnement.

Un recul de l’endimanchement se fait au profit de vêtements plus décontractés et au cours des années 1970, le survêtement fait place au jogging, qui phagocyte la garde-robe du week-end. La mode des années 1980, incarnée par Grace Jones, dessinera une silhouette agressive. Hommes et femmes, sont taillés en V. Les épaules sont élargies, le bassin est étroit, les jambes paraissent interminables. Les jupes courtes s’assortissent de hauts talons ou de baskets qui s’introduisent ainsi en ville.

Dress (dé)Codage

Qu’en est-il du IIIe millénaire ? « La construction de l’apparence se fait d’une manière consciente et délibérée. Les individus sont désormais surinformés sur la signification de chaque look. Cependant, les foules occidentales ont une apparence homogène » affirme Guillaume Erner. « La mode se résume en une trilogie universelle : jeans, tee-shirts et baskets ». La silhouette semble s’amenuiser, la carrure est presque étriquée, les vêtements épousent les lignes du corps. Du noir, du gris, du blanc, du beige : telle est la palette qui s’applique à l’uniforme (pantalon, tee-shirt et veste) des deux sexes. Dans cette mode unisexe, on cherche malgré tout à individualiser son apparence, à se situer, à échanger des codes et des signes pour communiquer avec autrui. C’est pourquoi l’uniforme jeans, tee-shirt et baskets se complète de nos jours, d’accessoires parfois luxueux.

Egalité ou Singularité ?

Alors, pouvons nous dire que la mode est au service de la beauté ? Ce qui est sûr, c’est que la mode répond à notre besoin d’appartenance, à notre besoin d’identification à un groupe. En effet, en suivant les tendances, nous envoyons des messages forts de lutte contre l’abandon, contre l’exclusion.

La première émancipation des femmes a consisté à aller copier les vêtements masculins et à mettre en valeur une telle sobriété que nous ne distinguons plus forcément la tenue extérieure ou intérieure. Suite à cela, le culte du corps s’est développé au détriment du vêtement. De la force androgyne, nous nous sommes laissés emporter par un tel besoin de similarité entre les hommes et les femmes que nous portons aujourd’hui des vêtements « unisexe ».

Alors, pourquoi ne pas imaginer une deuxième émancipation, celle d’une reconquête de notre identité féminine, qui consisterait à se considérer l’égale de l’homme tout en se démarquant de son style ? Créateurs de beauté, défenseurs de la féminité, à vos crayons.

 

©Christine Huchette 2018

S'inscrire à la newsletter