À propos

Les grands, derrière…, les petits, devant !

Bénabar, dans sa chanson « les épices du souk du Caire », attire l’attention sur notre comportement grégaire, face à la prise de photos. « Monsieur tout le monde », la semaine dernière au musée, flashe toutes les œuvres exposées. Mon meilleur ami rentre d’un weekend à Rome avec plus de 500 clichés. Mais qu’avons-nous donc tous, à vouloir reproduire tout ce que nous voyons, à collectionner des photos par milliers, sans même prendre le temps ensuite de les regarder ?

Publié dans Activmag, 

Argentique ou numérique, rare ou à profusion, la photo est une œuvre d’art, si celui qui  appuie sur le déclic, fixe ce qui le touche, ce qui lui parle. « On photographie ce qui nous interpelle » nous rapporte Sarah Moon, qui vient d’exposer au Jardin des Plantes à Paris une série de photos intitulée « Alchimies ». « Dans la photographie, on cherche le hasard, la valeur ajoutée que l’on n’a pas prévue », ajoute-elle. Il s’agit en effet de trouver un écho entre le monde et soi-même. De son côté, Sabine Weiss a photographié les vieillards, les enfants, les jeunes femmes qu’elle rencontre lors de ses voyages. Son art a été de ne jamais troubler la tranquillité des personnes qu’elle capte dans son objectif.

Plus qu’une image

Ce qui est intéressant dans une photo est ce qu’elle exprime, c’est ce qui la différencie de l’image. La beauté est partout et elle est surtout dans le regard qu’on lui porte. On peut passer devant un arbre une dizaine de fois et puis, tout d’un coup, on le voit parce qu’on le charge de quelque chose qu’on ressent à ce moment là. La photo révèle ce que le photographe a dans la tête. Cela peut-être une extrême solitude, que l’on trouve par exemple dans l’œuvre d’André Kertész (Lost Cloud 1937).

La magie de la photographie réside dans le fait que la photo tout en captant la réalité, est capable de découvrir, de révéler et de mettre en lumière des moments narratifs, hors du temps, à partir d’images réelles du monde qui nous entoure. Il peut s’agir d’une fenêtre ouverte avec le vent dans le rideau (André Kertesz, Readings) qui nous transporte loin, au dehors (évasion, liberté, insouciance) ou encore d’une balustrade en fer forgé (anonyme), d’un balcon de chambre, unique élément du cliché qui nous ramène dans le passé (nostalgie, admiration, sérénité, temps qui passe, souvenir qui reste). La photo réussie est celle qui va nous donner envie de nous raconter à nous-mêmes une histoire.

Raconter une histoire

En ce mois de décembre, riche en évènements festifs, rassemblements familiaux, fêtes entre amis, nous allons être tous accros à nos petits appareils. Nous allons capter ces retrouvailles, ces rires et ses pleurs peut-être, ces petits riens qui sont pourtant au cœur de notre vie et qui racontent notre histoire. Et notre histoire, ce sont aussi nos ressentis

J’ai sorti mes albums. Pour me remettre dans l’ambiance et me préparer aux grandes émotions, j’ai feuilleté : Damien et Delphine devant le sapin en 1997, puis Damien et Delphine devant le sapin en 1999, puis Damien et Delphine devant le sapin en 2005 et toujours eux, devant ce même sapin en 2011. OK ! Cette année, c’est promis, je change. Cette année, ce sera « les grands derrière, les petits devant » ….. Bien sûr que non…

Cette année, je choisirai le bon moment, je chercherai à immortaliser une ambiance, un partage, une joie. Je ferai en sorte que de donner une valeur toute particulière à ces souvenirs, qu’ils puissent traverser le temps et être le médium qui témoignera de l’intensité de nos moments partagés. Et vous ?

©Christine Huchette 2018

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